
Tadjikistan
Trekking Pamir
Plus petit pays d’Asie centrale mais l’un des plus hauts au monde. Par son relief très montagneux, le territoire se situe à une altitude moyenne de 3186 m au-dessus du niveau de la mer, il n’est donc rien de plus « normal » que de mettre les chaussures de randonnée aux pieds et le sac sur le dos pour découvrir le Tadjikistan. Voici quelques lignes qui résument notre trek dans les montagnes du Pamir, un massif isolé et de haute montagne, à la nature sauvage dans laquelle s’est établi un peuple aux doux visages.
Qui dit climat continental, dit chaleur en été, encore plus dans une grande ville… Bienvenue à Dushanbé, capitale Tadjike très très chaude où notre aventure commence. La ville surprend par son modernisme et son économie, ici on est loin de l’image Tadjik que l’on se fait. Une journée avec quelques visites et repas et puis s’en va !
Sur les routes
Ici pas d’accès aérien pour se rendre au départ de notre trek. Et c’est mieux comme ça, car la route est incroyable et les pistes époustouflantes. C’est d’abord le Panj, fleuve tumultueux qui délimite le Tadjikistan de l’Afghanistan, que nous longeons sur une route coincée entre de hautes falaises ocre et l’eau grisâtre du Panj. De l’autre côté du fleuve, les villages et pistes plus sommaires de l’Afghanistan contrastent avec le côté Tadjik. Plus loin nous roulons sur la mythique Pamir Highway, une des anciennes voies des Routes de la Soie. La route encore cabossée et en terre à certains endroits, ne cesse de se moderniser sous les travaux des machines chinoises. Puis on tourne à gauche et démarre une autre aventure, la piste de la Bartang vallée, éponyme de son torrent rugissant. Au-dessus de nos têtes, des sommets qui jouxtent les 6000 m, sous les roues, une piste de terre poussiéreuse avec quelques traversées de villages de plus en plus isolés. On est rentré dans le monde minéral, le monde du Pamir, un monde vertical !
Les rencontres
On a vite compris que les tadjiks étaient un peuple très accueillant, aidant et curieux. Les sourires et les discussions sont francs et bienveillants, surtout avec les enfants. Dans nos rencontres, il y a tout d’abord notre équipe locale, les muletiers et le guide. Aux premiers abords timides, nous ne tardons pas à leur faire part de notre bonne humeur et à nous lier d’amitié avec eux. Si le guide parle anglais, il nous faut échanger plus sommairement avec les muletiers, un mixe entre les mots du corps et un charabia oral d’anglico-tadjiko-français ! 15 jours avec eux permettent de nouer une vraie relation, et chaque jour qui passe, nous rapproche un peu plus. La relation avec les mules est un peu plus complexe, on ne peut que leur être remerciant de porter nos affaires, mais leurs cris nocturnes, qui certes nous font rire, ne sont pas les meilleures berceuses pour s’endormir, mais par contre de très bons réveils ! Au cours de notre trek, on rencontre aussi quelques locaux, notamment des bergers, qui vivent tout l’été dans des conditions plus que rustiques qui forcent le respect. Il y a aussi les familles qui nous offrent leur toit pour une nuit ou quelques minutes pour partager un moment avec eux. Ephémères, spontanées, surprenantes… ces rencontres sont pour autant d’une générosité exceptionnelle, d’un partage sans égal qui arrache à nos petits cœurs des sentiments éternels. À l’aller comme au retour, nos chauffeurs de jeep ont aussi contribué à nous faire aimer cette population, et pourtant, difficile encore une fois de communiquer verbalement, mais les regards, les gestes et les taquineries ne trahissent pas. Ces rencontres, ces visages, ces moments de partage ont assurément magnifié chaque étape de notre trek.

Randonnées à la journée
On est venu pour s’émerveiller d’un environnement inconnu, et on peut dire qu’on a été servi ! Le Pamir est un haut massif montagneux difficile d’accès, très isolé et encore peu connu des trekkeurs. Les infrastructures et sentiers sont donc très sommaires, voire inexistants parfois, dans un milieu brut et sauvage. Après ces 14 jours de marche, ce qui est sûr, c’est que le Pamir ne manque ni d’eau ni de cailloux ! Voilà les deux éléments majeurs avec et contre lesquels il a fallu évoluer. D’un côté, on était ébahis devant les eaux multicolores des nombreux lacs contournés et de l’autre il fallait traverser ses eaux, s’en échappant avec des passages à gué, l’eau jusqu’aux genoux. D’un côté, les falaises aux strates colorées et leurs gros blocs détachés sont vertigineux et majestueux surtout quand on passe à leur pied et de l’autre côté il faut rester concentré à chaque pas quand on évolue dans les milliers de pierres éboulées de ces falaises, ici l’éboulis est roi et nous sommes ses sujets ! La dualité continue avec les premiers jours de très grosses chaleurs, parfois même une sensation de four entre les rochers, et des jours en altitude bien plus froids, notamment la nuit, avec quelques flocons… tout notre habillement a servi, c’est au moins ça.

On ne pensait pas avoir privatisé le trek, parfois aucune âme qui vive sur 2 ou 3 jours consécutifs, pour notre plus grand bonheur à nous sentir seuls ici, mais aussi avec quelques craintes de l’isolement et des bobos à éviter. Les pique-niques, fromage/salami/fruits secs/chocolat sont nutritifs à défaut d’être gastronomiques, et permettent de redonner du carburant dans les jambes et la tête pour rester attentifs sur les « sentiers » de ce massif autant technique que magique.
Bivouac le soir
Le rituel est bien rodé et ce dès le premier jour. En même temps, les possibilités se limitent aux basiques, soit manger, se laver et dormir. Ainsi, une fois les chaussures enlevées, on assemble les arceaux pour lever la tente face au lac ou en bord de rivière. Emplacement stratégique en bord d’eau car c’est la seconde étape, celle de la toilette, plus ou moins fraîche, suivant le niveau d’immersion. Plus c’est froid, moins de peau on baigne… et dans un lac à 4000 m, il n’y a parfois que les ongles qui trempent. Tente montée et corps lavé, le repos est mérité et se déroule dans nos tentes, dehors ou dans la tente cuisine. C’est d’ailleurs dans cette dernière qu’il y a le plus d’ambiance, il faut dire que l’équipe locale y passe son temps, entre préparation de la soupe du soir et discussions. Pour passer de bons moments, c’est donc the place to be ! Musique, mots croisés, rires, goûter animent nos fins de journée dans des lieux de bivouacs 4 étoiles.
Les moments forts
Si tous les moments construisent la réussite et les souvenirs d’une aventure, certains sont plus forts ou plus marquants que d’autres. Voici ces moments :
- Bartang vallée en 4×4 : assis « confortablement » dans la jeep, cette piste marque le début du Pamir, la porte d’entrée de notre trek. Au-delà de la symbolique, la vallée offre un paysage imposant qui nous domine de la tête, avec ses sommets acérés, aux pieds, avec son puissant torrent.
- Lac Sarez : il en a fallu des efforts pour arriver sur les berges de ce lac à l’histoire et aux chiffres étonnants. Ce lac, au bleu profond et niché dans un écrin minéral, est issu d’un imposant glissement de terrain (1911) qui a barré le torrent Murghab, pour créer un lac naturel profond de 500 m. Étincelant et imposant !
- Lac Zaroshkul : une succession de lacs aux différentes nuances de bleu se succède avant le bouquet final du lac Zaroshkul. Au pied de sommets glaciaires, une zone de bivouac herbeuse et un panorama d’exception font de ce lac une merveille du Tadjikistan, un des plus beaux lacs d’Asie centrale.
- Bachor : premier « village » après 8 jours de trek, il est une oasis dans un univers sec et minéral. Une pause ressourçante pour nos corps mais aussi pour l’esprit avec la rencontre de villageois qui nous ouvrent leur porte et leur cœur en nous livrant leur vie assez rustique dans ces contrées isolées.
- Col de Vrang : point culminant de notre trek à 5010 m, il offre un panorama d’exception avec des sommets à plus de 6000 m, une vue sur les monts Afghans et un glacier imposant. Mais c’est aussi son ascension dans la neige et sa descente pierreuse qui en font un moment mémorable de notre trek.
- Dernière étape : parfois elles sont roulantes ces dernières, mais celle-là a été sûrement une des étapes les plus difficiles. La raison, des traversées en devers de grands éboulements dans lesquels on ne veut pas s’ébouler. À cela ajoutons le retour de quelques degrés avec la perte d’altitude. Chaude descente !
- Équipe locale : du premier au dernier jour, notre guide et les muletiers nous ont facilité et sécurisé ce trek exigeant. Mais surtout, par leur générosité et leur sourire, ils ont été tout simplement source de bonheur.
On était venu vivre l’aventure, le retour aux basiques, l’isolement, la grandeur et on n’a pas été déçu. Chaque jour nous a offert un mix de tout cela, nous laissant les yeux grands ouverts. Et c’est aussi notre cœur qui s’est ouvert, au fil des rencontres, des connaissances et du partage que nous ont offerts les locaux vivant dans le Pamir. Un Pamir aux reliefs esthétiques dans lequel vit une culture authentique. Tojikiston ba Pesh !
Clément Legain
